Gestion des Applicatifs et Maintenance Evolutive
Retail & Distribution
Pendant des décennies, le merchandising a été défini comme « l’art de mettre le bon produit, au bon endroit, au bon moment ». Mais pour Lilia Mrad, Directrice Consulting Consumer Goods, Retail & Luxury, cette définition ne suffit plus à saisir les enjeux d’aujourd’hui. Dans un monde où les consommateurs évoluent à grande vitesse, où les tendances éclatent en quelques heures sur les réseaux sociaux et où les marchés sont globalisés, la mode doit se réinventer. Selon elle, l’avenir appartient aux marques capables d’anticiper les désirs des consommateurs avant même qu’ils ne prennent forme – un merchandising tourné non plus vers la réaction, mais vers la projection.
Construire une collection, c’est à la fois un art et une science. Derrière chaque saison se cache une vision créative. Mais derrière cette vision, il y a aussi quelque chose de plus discret, plus technique mais tout aussi crucial : le plan de collection. Il est le pilier du développement des collections. Il définit le nombre de pièces, les gammes de prix, les matières, les couleurs, et l’équilibre entre pièces « images » et pièces « commerciales ». Le plan de collection, c’est l’architecture invisible d’une saison.
Traditionnellement, ce plan reposait sur l’intuition des créateurs. Un créateur s’appuyait sur son regard, son expérience, son instinct. Mais l’instinct, aussi précieux soit-il, montre ses limites : surproduction, ratés, inadéquation avec les attentes réelles du marché. C’est pourquoi, aujourd’hui, la complexité de l’industrie de la mode rend indispensable l’appui sur des données fiables et des systèmes d’information robustes.
La data a ouvert une nouvelle ère. Une ère où l’intuition reste essentielle, mais où elle est soutenue, amplifiée, enrichie par des informations précises et en temps réel.
Deux grands types de données existent :
Ces données permettent de comprendre ce qui fonctionne déjà et d’anticiper les besoins de réassort, d’ajuster les volumes, de piloter les marges…
Elles donnent une lecture de ce qui émerge, parfois avant même que le client n’entre en boutique.
L’avenir repose sur la fusion de ces deux univers. Car si on ne regarde que les données internes, on reste tournés vers le passé. Et si on ne regarde que l’externe, on risque de courir derrière toutes les tendances sans cohérence avec l’ADN de la marque.
Grâce à ces signaux, on construit une collection au plus près de la réalité des consommateurs, mais avec un temps d’avance.
En d’autres termes, le plan de collection, a besoin non seulement d’idées, mais aussi d’une masse d’informations… Mais pour transformer cette data en véritable boussole, un socle technologique solide est indispensable.
En effet, on entend constamment parler du pouvoir et du potentiel des données mais on évoque moins souvent la difficulté de gérer le déluge d’informations à notre disposition. Aujourd’hui, de nombreux acteurs du retail évoquent la même problématique : « Nous disposons de trop de données, mais pas assez d’informations ».
Les systèmes d’information doivent permettre de collecter, fiabiliser et croiser ces données internes et externes, pour créer une boussole fiable avec des données justes, centralisées et accessibles en temps réel.
Un plan de collection mal alimenté par des SI fragiles, c’est comme un GPS sans satellite : il peut vous envoyer dans la mauvaise direction.
Toutefois, la data et la technologie ne suffisent pas. Il y a un autre facteur clé de succès dont on parle moins et qui est pourtant absolument essentiel : l’alignement des équipes.
Un plan de collection n’est jamais le fruit d’une seule personne, c’est une collaboration. Il est le résultat d’une chaîne complète, qui va du studio de création jusqu’aux équipes retail et commerciales, en passant par le développement produit, la supply chain, le marketing. Chaque maillon de la chaîne doit travailler en synergie.
Lorsque les silos s’installent, les conséquences peuvent être lourdes : collections magnifiques mais impossibles à produire dans les délais, des prévisions irréalistes qui se traduisent par des invendus, des assortiments en magasin qui ne correspondent pas aux attentes locales.
Un plan de collection réussi, ce n’est donc pas seulement une question de data ou de systèmes. C’est une question de collaboration, de dialogue et de synchronisation entre toutes les fonctions.
Les entreprises les plus performantes aujourd’hui investissent dans des processus intégrés. Ils s’appuient sur des outils collaboratifs qui permettent aux équipes de voir en « temps réel » l’impact de leurs choix.
Ces outils connectés permettent de gagner un temps considérable. Là où, il y a encore quelques années, chaque service travaillait sur ses propres fichiers qu’il fallait consolider manuellement. Aujourd’hui, des plateformes comme Centric Software (PLM) ou Anaplan (planification connectée) fluidifient et permettent de synchroniser les décisions : une modification décidée par le studio est immédiatement visible par le produit et la supply, un ajustement de prévisions est automatiquement répercuté sur le budget et les achats. Résultat : moins de réunions de crise, moins d’allers-retours et des semaines entières gagnées dans la préparation des collections.
Tout ce temps gagné, peut désormais être consacré à créer de la valeur, et non à faire de la mécanique (consolider des fichiers ou à retravailler des erreurs d’alignements…).
La technologie crée donc la transparence et la vitesse, mais c’est l’humain, ensemble, qui crée la cohérence.
L’intelligence artificielle commence à faire son entrée dans la scène de la mode et du retail. Ce nouvel allié de la data est venue renforcer cette dynamique.
L’une des fonctionnalités particulièrement puissantes des outils d’IA est leur capacité à croiser des millions de données : ventes passées, tendances culturelles, météo, événements, actualités… pour prévoir ce qui va marcher demain.
L’IA ne se contente donc pas uniquement de prédire, elle simule et stimule. Elle permet de tester virtuellement un plan de collection complet : silhouettes, couleurs, prix… Montrer à quoi ressemblera l’équilibre d’une collection avant même de la produire.
En générant des moodboards, en proposant des associations de matières inédites, en explorant des univers visuels surprenants, l’IA peut alors même inspirer. Non pas pour remplacer le créateur, mais pour stimuler son imagination.
Depuis deux ans, une autre vague technologique a pris une ampleur extraordinaire : l’IA générative. Contrairement à l’IA prédictive, qui projette et calcule, l’IA générative crée. Elle produit des images, des textes, des vidéos, des prototypes… à partir de simples instructions.
Des outils comme MidJourney, Stable Diffusion ou Runway ML produisent des moodboards et des campagnes en quelques minutes. ChatGPT ou Claude peuvent accompagner les équipes marketing dans la rédaction de contenus. Syrup Tech et Fashwell optimisent assortiments et recommandations visuelles.
L’IA devient un partenaire créatif, un assistant stratégique. Elle ouvre des pistes, casse des codes, libère du temps… Mais attention, toutes ces IA, prédictives comme génératives, ne sont puissantes que si elles reposent sur un socle solide de données et de systèmes d’information. L’IA, c’est un peu comme une Formule 1. Elle va très vite… mais si la piste n’est pas entretenue, elle sort de route.
Aujourd’hui, il y a encore peu d’exemples d’utilisation d’IA dans nos domaines mais les retailers se posent tous la question de comment intégrer l’IA à leurs processus et organisation. Selon McKinsey, plus de 50 % des dirigeants du secteur de la distribution considèrent l’analyse avancée comme une priorité stratégique majeure, mais seulement 14 % se disent prêts à l’appliquer.
Le risque, c’est de croire que l’IA peut tout décider, qu’elle peut remplacer l’humain. Or, un plan de collection ne se résume pas à une série de chiffres, c’est une vision, une histoire, une identité de marque. Et ça, aucune machine ne peut le créer seule.
C’est pourquoi le rôle de l’humain reste essentiel : le rôle du designer, du merchandiser, du chef de produit : pour interpréter les données, pour donner du sens aux prédictions, pour injecter de l’émotion dans les collections.
L’IA doit rester un outil. Un allié. Une aide précieuse. Mais jamais une fin en soi.
Le plan de collection de demain sera :
Mais il restera profondément humain ! Sa pertinence dépendra de l’alignement des équipes et de la robustesse des systèmes d’information. « La robustesse des SI est la colonne vertébrale du plan de collection mais l’alignement des équipes, du studio jusqu’au retail, en est le cœur battant. »
Au fond, créer une collection n’est pas seulement remplir un tableau, c’est imaginer la garde-robe d’une société, capter l’esprit d’une époque, raconter une histoire. La data et l’IA nous donnent des outils incroyables. Elles sont comme une boussole, un radar, un projecteur sur l’avenir. Mais au bout du chemin, il y a toujours une main, une voix, une sensibilité qui décide.
Le défi n’est donc pas seulement de savoir quelle mode créer demain, mais de vérifier si nous avons des architectures assez solides et des organisations assez alignées pour la rendre possible. Et c’est bien ça, au fond, la mission d’un plan de collection : transformer des chiffres en histoires, transformer des tendances en rêves, transformer l’anticipation en désir…
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14 mai 2025